Pour la philosophe Michela Marzano, il faut remettre la coopération au cœur de la société pour contrer les ravages du «tous contre tous». L’idéologie libérale et le mythe de la «confiance en soi» alimentent la méfiance généralisée qui sévit dans notre société. Elle plaide pour le retour de la confiance entre les individus, sans laquelle aucune société ne peut survivre.
Hommes politiques, entreprises ou économistes n’ont jamais autant parlé de confiance. Pourtant, nous sommes de plus en plus méfiants. Que se passe-t-il ?
En 2008, lors de la crise des subprimes, on s’est rendu compte que les responsables politiques et économiques nous ont baladés. Que les premiers avaient fait des promesses qu’ils savaient irréalisables. Et que les seconds avaient fait comme si la croissance pouvait toujours être au rendez-vous. A force d’avoir trompé autrui pendant des années, le capitalisme lui-même s’est mis à ne plus avoir confiance, y compris dans ses propres produits. Le système bancaire s’est effondré faute de confiance dans les prêts interbancaires. Nos dirigeants ont alors dit : «Il faut que la confiance revienne.» Mais cela ne suffit pas, la confiance ne se décrète pas. Après l’avoir détruite, on ne peut pas la faire revenir d’un claquement de doigts.
D’autant que le malaise est profond. On a perdu certains repères, on a oublié l’importance de la coopération et même sa signification. Par exemple, à force d’avoir joué avec le modèle du «tous contre tous», les entreprises ne savent plus comment faire travailler leurs salariés en équipe. Et ce discours managérial fait des ravages dans toute la société.