L'analyse du cycle de vie d'un produit favorise l'échange d'informations et réduit les coûts.
Véritable atout marketing à l'heure du développement durable tous azimuts, le bilan écologique nécessite un savoir-faire encore assez rare. « Une centaine de consultants, au plus, travaillent sur ce type d'actions en France », estime Philippe Osset, directeur d'Ecobilan, filiale du cabinet de consultants PriceWaterhouseCoopers. De plus en plus d'entreprises, dans le bâtiment, l'électronique ou l'automobile, désireuses de communiquer sur leur performance environnementale, recourent à ces prestataires qui calculent les émissions de gaz à effet de serre, la pollution de l'eau, de l'air... soit une dizaine d'indicateurs.
Certaines internalisent ce savoir-faire en constituant des équipes compétentes en matière d'analyse de cycle de vie (ACV), terme utilisé depuis la création, il y a dix ans, de la norme internationale environnementale ISO 14040.
Calculée par exemple pour un pot de yaourt ou un rasoir jetable, l'ACV peut aussi permettre de réduire les coûts, jusqu'à hauteur de 10 %, selon M. Osset. Mais cela demande un lourd travail transversal au sein de l'entreprise, le but étant de remonter la filière, de l'extraction des matières premières à la mise au rebut en passant par l'utilisation du produit. Un travail qui nécessite en moyenne six mois. Et se conclut par un document, « sorte de bilan comptable des flux de matières et d'énergies, tout au long de la vie du produit », explique Myriam Puaut, ingénieure à l'Agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui aide les entreprises à financer leur bilan économique.
Un travail d'experts, donc, souvent confié au département marketing. Comme à Lafarge, où « le plus gros du travail est la difficile collecte des données », souligne Alain Birault, directeur développement du service marketing. « Dans chaque usine, un référent doit faire remonter l'information sur la consommation d'eau, le recyclage des déchets... »
A EDF, qui a effectué des bilans de ses filières de production électrique, Denis Le Boulch, ingénieur responsable de ces études, estime que cette collecte « a permis de créer des liens au sein de l'entreprise ». « Pour obtenir les informations, explique-t-il, nous sommes amenés à rencontrer des gens et à les sensibiliser aux questions environnementales ». Autant que le résultat, « le chemin pour y arriver donne une connaissance très intéressante » ; d'où l'intérêt, selon l'ingénieur, de ne pas sous-traiter complètement l'étude à un cabinet.
Par ailleurs, l'équipe doit maîtriser la « connaissance de la technique ACV, comprendre la méthode et savoir se servir du logiciel utilisé », ce qui nécessite un minimum de formation. C'est le rôle d'un cabinet comme Ecobilan, qui, facturant un premier projet de 30 000 à 100 000 euros selon la complexité du produit, se présente comme acteur d'un « transfert de savoir-faire ». Le cabinet fournit le logiciel et forme des personnes, de telle sorte que les entreprises « améliorent leurs compétences internes », note M. Birault.
Le scénario est le même à Procter & Gamble France, géant des produits de grande consommation, souvent polluants. 175 personnes y travaillent sur les questions écologiques, explique Nicole Salducci, responsable de la communication scientifique. Pour l'ACV de la lessive Ariel « actif à froid », par exemple, « trois personnes ont été mobilisées dans le département recherche et développement ». Une fois mesuré l'impact d'une baisse des températures de l'eau sur la consommation d'énergie, « l'entreprise cherche à communiquer les résultats à l'extérieur ». De l'ACV à la publicité, il n'y a qu'un pas.
Laureen Ortiz
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